Pourquoi les IA sont dangereuses sur les applications de rencontre?

La multiplication de différents services d’intelligence artificielle inquiète, et il y a de quoi.

Imaginez. Vous êtes sur Tinder un soir sur votre canapé. Vous matchez avec Pierre 35 ans. Ses photos sont jolies, il présente bien. Sourire, costard, peau parfaite. Votre idéal. Et puis vous commencez à discuter. Pierre est drôle, il a toujours la petite phrase qui va bien, la blague parfaite, la répartie affutée. Bref, vous êtes à fond.

Sauf que ce que vous ne savez pas, c’est que Pierre n’existe pas. Ou du moins, cette version de Pierre avec qui vous avez matché n’est pas la vraie. Car pour s’aider à pécho, Pierre a fait appel à une start up d’intelligence artificielle spécialisée dans le business des applications de rencontre.
C’est le cas par exemple de PhotoIA. Elle propose un pack Tinder à 19 dollars pour améliorer vos photos et vous rendre “irrésistible”. Vous envoyez 12 photos de vous version normale et hop… Vous en avez 12 nouvelles… des versions de vous améliorée par l’IA. Je dirais même surtout version cliché ! Car les photos proposées sont bien dans le stéréotype : lunettes de soleil, veste en cuir, assis à côté d’une bibliothèque, en costard. Un vrai catalogue.

Sauf que ça n’est que la première étape. Car après l’apparence, il faut matcher et discuter. Pierre va donc faire appel à une autre start up. L’application CupidBot, encore en version test aujourd’hui. Selon ses créateurs, leur IA propose je cite de “sélectionner les profils qui sont exactement leur genre et fait en sorte d’avoir des conversations de qualité avec elle". Le tout pour 14 euros par mois. En gros leur IA serait capable d’analyser les précédents matchs et conversations d’une personne pour trouver celle qui a les mêmes centres d’intérêt que nous. Je parle au conditionnel car vu que l’application est en phase de test, tout semble assez flou pour le moment. Le site Vice a essayé de s’inscrire mais s’est retrouvé sur une liste d’attente.

En tout cas, les arguments de vente sont bien là. Le but de Cupidbot est que leurs utilisateurs n’aient plus besoin d’aller sur les applis de rencontre. Que l’IA fasse le travail pour eux. Eux, ils ont juste à attendre de recevoir une notification quand le robot leur a trouvé un date, avec le numéro de la meuf et le lieu de rendez-vous.

CupidBot a été créé par des anciens employés de Tinder, seulement pour les hommes

Et hétéro aussi sinon c’est pas drôle. Et voici leur argument : « On s’est concentré sur la vie amoureuse des hommes hétéro parce c’est eux qui souffrent le plus sur les applications de rencontre. Il faut énormément de temps pour qu’un mec lambda arrive ne serait-ce qu’à avoir un date par mois. » Sortez les violons, vraiment. Je rappelle qu’on parle d’une intelligence artificielle censée obtenir des rdv avec des femmes en les manipulant.

Et pour le moment Tinder et ses comparses n’ont pas pris de mesure pour lutter contre l’arrivée de ces technologies. Leurs règles d’utilisation spécifient juste qu’il est interdit d’usurper une identité. Sauf qu’il va falloir qu’elles trouvent un moyen de vite se mettre à niveau. Car si maintenant les utilisateurs doivent se demander s’ils parlent à une vraie personne ou un robot, ça va être compliqué. Déjà que pour les femmes, les applications de rencontre sont loin d’être des safe place, mais plutôt des endroits où elles peuvent se faire harceler ou arnaquer… Là on passe encore à un autre niveau.

D’ailleurs selon une étude de Carom, une appli de rencontre justement, 54% des Français seraient aujourd’hui insatisfaits des applications de rencontres. Et ça va manifestement être de plus en plus difficile de les contredire.

Source :
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/ville-sanitaire/veille-sanitaire-du-mercredi-12-avril-2023-7508236